Polémique autour d’un projet de contournement autoroutier en Camargue

Les Echos, Par Paul Molga, Publié le 27 avr. 2022 à 8:29

Envisagée depuis les années 1990, cette infrastructure longue d’une trentaine de kilomètres va border la lisière du parc naturel régional. L’enquête publique doit être lancée d’ici à la fin de l’année. Les riverains, écologistes et agriculteurs envisagent un recours en justice.

Les riverains et associations de protection de l’environnement et du patrimoine de Camargue pensent tenir l’occasion de retarder le projet de contournement autoroutier d’ Arles envisagé par le gouvernement.

Lors d’une des concertations publiques de ce tracé organisée par la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) en janvier, des habitants ont pointé dans la présentation une erreur de plan susceptible de constituer une « tromperie manifeste du public », selon la responsable de l’Association Camargue environnement (Acen), Marie-Hélène Fabre. Elle a donc demandé l’organisation d’une nouvelle concertation, une requête restée lettre morte, et envisage désormais de porter l’affaire en justice.

Sur pilotis

Ce contournement controversé revient comme une arlésienne depuis 1995 pour « terminer la liaison autoroutière de l’axe méditerranéen entre l’Espagne et l’Italie sur une section d’environ 26 km », selon la description donnée par la préfecture de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Parmi les dix options étudiées, celle qui a été retenue passerait très au sud d’Arles et traverserait sur pilotis plusieurs zones humides classées Natura 2000 en lisière immédiate du parc naturel.

« Il menace 700 hectares d’espaces agricoles, 52 hectares de foin de Crau classés AOC, des zones d’élevage de taureaux et d’ovins, la nappe phréatique de la plaine et la tranquillité de plusieurs mas », s’inquiète Véronique Coulomb, porte-parole du groupe local d’EELV Pays d’Arles, qui multiplie les journées d’actions depuis plusieurs semaines avec un collectif de 25 associations, ONG et agriculteurs constitué pour défendre ces terres. La polémique a donné l’occasion d’une passe d’armes entre le journaliste Stéphane Bern , ambassadeur pour la biodiversité du WWF France, et le maire d’Arles, Patrick de Carolis. Dans un tweet posté fin janvier, le premier dénonçait « un massacre de la biodiversité et du patrimoine paysager et historique de la Camargue ».

Soulager le trafic périurbain

Patrick de Carolis – ancien président de France Télévisions – avait alors argumenté sur « la santé de plus de 5.000 Arlésiens qui vivent à moins de 150 mètres de la RN113 » que doit soulager l’autoroute. « Les Arlésiens pâtissent quotidiennement des problématiques de trafic », décrit la conseillère municipale déléguée au transport et à la mobilité de la ville d’Arles, Marie-Amélie Ferrand Coccia.

Avec l’autoroute, la moitié du transit interrégional (dont 90 % des poids lourds) et le cinquième du trafic régional seraient supprimés. Sur le linéaire concerné par le projet, le tronçon routier le plus chargé́ accueille 75.800 véhicules par jour, dont 9 % de poids lourds.

Sans recours judiciaire, l’enquête publique devrait être lancée à la fin de l’année pour une mise en service de l’axe vers 2028, malgré de nombreuses réserves émises par l’Autorité environnementale. Celle-ci note en particulier que « la raison impérative d’intérêt public majeur du projet devra être démontrée pour bénéficier d’une dérogation espèces protégées ».

D’autres projets sont également en développement en Camargue : la construction d’un pont pour remplacer l’actuel bac de Barcarin à Salin-de-Giraud, qui limite le trafic dans le Delta, et une unité de méthanisation à Saint-Martin-de-Crau qui est accusé d’alourdir potentiellement les flux de camions.

Paul Molga (Correspondant à Marseille)

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